La longue rangée de peupliers qui bordait le lycée Valentine Labbé rue Doumer à La Madeleine n’est plus.

Abattus. En pleine crise COVID 19. Dans un lycée vidé de ses occupants, dans le grand silence d’une cour d’école désertée, d’un Conseil d’Administration qu’on ne peut plus réunir.

Privés de ses défenseurs, les arbres n’ont pas pu faire front seuls, tenir la digue, faire bouger les lignes. De ce carnage , ne restent que les souches, les moignons des corps amputés, une cicatrice , un témoignage, une trace du passé. Étrangement, les corps chenus ne sont pas restés longtemps allongés, morts dans la cour du lycée. On les a vite dégagés, en moins d’une semaine. Vite, il fallait faire vite. Allez, à la découpe et qu’on en parle plus et qu’on oublie surtout.

De tout façon, le mal était fait.

L’occasion était trop belle pour le proprio, la Région Hauts de France. Débarrassé pour un temps de ses locataires agités et encombrants, le proprio a profité de la pause COVID  pour faire ses travaux, en douce. Une telle aubaine ça ne se trouve pas sous le sabot d’un cheval  ! Comme ils ont dû se frotter les mains, ces éminences grises et autres élus de la majorité régionale, ceux- là même, opportunistes, qui dirigent les conseils municipaux des villes et siègent dans les conseils d’administration des lycées ?

Pouvoir agir en toute tranquillité. Eviter l’affront d’une horde d’environnementalistes braillards, éviter l’argumentaire, éviter de devoir rendre des comptes, éviter les questions , éviter le risque que l’affaire ne s’envenime, ne s’échappe des murs de l’établissement, pour ouvrir la boîte de Pandore sur la place publique. C’est que le lycée est situé juste en face du site du Tir à l’Arc, site vendu dans l’urgence par la ville à Bouygues et dont le projet immobilier remet sur la table la question de l’artificialisation des sols dans la course effrénée pour toujours plus de béton ( relire notre dossier sur les mensonges de la « densité heureuse ») .

A l’heure où la pause COVID pose les vraies questions sur la place de la nature en ville, il fallait agir vite avant que des citadins ne se mettent à rêver d’un urbanisme plus nature, plus humain.

L’occasion était trop belle pour la Région, débarrassée pour un temps, d’une parole gênante qui n’avait de cesse de rappeler que dans l’historique du projet de reconstruction du lycée Valentine Labbé , il n’était pas prévu d’abattre ces arbres bien au contraire. Mais, l’histoire, on le sait est toujours écrite par les vainqueurs, rarement par ses acteurs. Et puis, quand on veut tuer son chien on l’accuse de la rage.

Pourtant des arbres devant un ensemble construit, minéral , c’est précieux. Ça protège du vent, de la pluie , ça fait de l’ombre les jours de soleil , ça rafraîchit les jours de canicule. Des arbres dans une cour d’école, c’est précieux , ça raconte des histoires d’oiseaux, ça préserve de l’amnésie environnementale qui menace chaque fois que nous rognons sur un espace vert. Des peupliers sur un terrain marécageux c’est précieux. ça fait tampon , ça absorbe l’eau . Souvenez vous d’une autre rangée de peupliers , en bordure des jardins ouvriers madeleinois sur le territoire de la ville de Marquette. Le maire de l’époque les trouvait trop grands. A terre les arbres . Résultat, les jardins ont pris l’eau. Noyés les beaux jardins, à l’ancienne, avec leurs vieilles baignoires en galva, en céramique pour récupérer l’eau , leurs cabanes de jardin faites de bric et de broc, leurs potagers, leurs fleurs du temps de la biodiversité, de la difformité, celui d’avant l’uniformité et le conformisme.

A Valentine Labbé , on nous promet un arbre planté pour un arbre abattu. A suivre.

Demain, la nature reprendra ses droit. Elle est patiente avec nous, elle trouve toujours un chemin , fût-il de traverse.

Alors si la pause COVID nous a permis de revenir à elle, un temps, avant l’amnésie générale et si on lui donnait un coup de pouce ?

Samedi 16 mai 2020 , c’était la journée mondiale de mobilisation contre Bayer – Monsanto, le géant de l’agrochimie, celui qui rend la terre stérile pour mieux la violer. Vous y étiez  ?
Samedi 16 mai 2020 , c’était la journée mondiale de mobilisation contre Bayer – Monsanto, le géant de l’agrochimie, celui qui fait des paysans du monde des esclaves. Vous y étiez  ?
Samedi 16 mai 2020 , c’était la journée mondiale de mobilisation contre Bayer – Monsanto, le géant de l’agrochimie, celui qui empoisonne nos corps pour enfumer nos esprits. Vous y étiez ?
Vous y étiez , dites, puisque les arbres n’y sont plus ?
Nous , oui .